Les enluminures relatives à la vie religieuse
et consacrées aux reliques de la Passion
illustrant le texte de La Destruction de Rome
et de Fierabras dans le manuscrit à peintures
de Hanovre
- Marc Le Person
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Reliques et idoles utilisées comme armes idéologiques
L’émir Balan désespérant de ses dieux frappe avec un gourdin la statue de Mahon, sous le regard réprobateur de Sortibran
La mise en scène du désespoir des chefs païens devant l’inefficacité de leurs dieux se traduit souvent par des situations où ils se livrent à des violences et manifestent de grandes colères pour traduire leur désarroi.
fig. 10. Anonyme, « Balan brise l’idole de Mahon»,
Fierabras, ms. H, début du XIVe siècle,
Hanovre, Niedersächsische Landesbibliothek, IV-578, f° 87 r°
A droite, sous un arbre, Sortibran invite Balan à plus de modération en posant sa main gauche sur le bras gauche de l’émir, qui assène un vigoureux coup de gourdin sur la tête de Mahon, représenté sous les traits du diable, devant la porte ouverte du temple dont le toit incliné semble accuser le choc et rappelle curieusement le chapeau de l’émir.
Un baston en prent, a .II. poignes l’ad seisye.
Tost desuz vient corant a la Mahomerie.
Tex trois coups en dona Mahon delezl’oÿe ;
La teste li pescea et li coups li esmie.
Sortibrabras de Cornibre li confort et chastie :
[Place de l’enluminure dans le texte]
« Admirals, riches sire, mult fetes grant folye
Qe Mahon laidngiez, ceo est grant musardie !
Faistes ly droit, beau sire, qar forment li gramie ». (Fierabras, ms. H)
Il s’empara d’une massue, il la saisit à deux mains, courut aussitôt à la mosquée et en donna à Mahomet, près de l’oreille, trois coups tels qu’il lui brisa la tête et lui rompit le cou. Sortimbrant de Conimbre le calme et le réprimande : « Emir, puissant sire, vous commettez une très grande folie en outrageant Mahomet : c’est une grave faute ; présentez-lui vos excuses, cher seigneur, de peur qu’il ne s’irrite grandement. »