Photographie et photographes dans
la littérature belge francophone *
- Erika Wicky
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Fig. 1. Textyles, « La Littérature au prisme
de la phtographie », 2013
Depuis la parution des ouvrages de Philippe Ortel (La littérature à l’ère de la photographie, Jacqueline Chambon, 2002), de Daniel Grojnowski (Photographie et Langage, Corti, 2002) ou encore de Nancy Amstrong (Fiction in the Age of Photography, Harvard University Press, 2002), les relations entre photographie et littérature se sont imposées comme un nouveau domaine de recherche. Après le numéro de la revue Image and Narrative intitulé « Figurations iconographiques de l’écrivain », dirigé par David Martens et Anne Reverseau (K. U. Leuven), le dernier numéro de Textyles, Revue des lettres belges de langue française offre à ce domaine une contribution notable et inédite en situant la question dans le champ de la littérature belge francophone.
Un tel collectif semble d’autant plus important que la littérature belge francophone qui entretenait pendant tout le XIXe siècle des rapports très étroits avec les arts visuels (voir notamment l’article de Laurence Brogniez, Pictoriana : les écrits de peintres en Belgique (1830-2000), dans les Varia 1 de Textimage) a accueilli l’apparition de la photographie par un ouvrage dont la fortune critique reste très importante : Bruges la morte de Rodenbach. Quoi que suggère le titre, plutôt que d’envisager la littérature à travers le prisme de la photographie, les contributeurs analysent en quoi la photographie a stimulé la réflexion des écrivains sur leur propre pratique. Chacun des articles envisage la question de façon spécifique à partir de l’analyse de la production d’un ou deux écrivains ce qui permet d’appréhender le phénomène au plus près des textes, mais aussi des images puisque la revue est illustrée.
Parfois envisagée dans une perspective historique à travers des auteurs comme Georges Rodenbach, Paul Nougé ou encore Christian Dotremont, la question ne fait pas ici l’objet d’un panorama chronologique mais plutôt, suivant la formule du numéro collectif, d’une série d’études ponctuelles. Organisées en fonction de la nature de l’interaction entre littérature et photographie qu’elles abordent, celles-ci rendent compte non seulement de la grande diversité des modalités de l’articulation entre littérature et photographie, mais aussi de la variété des approches critiques susceptibles d’appréhender le phénomène. La photographie apparaît moins comme un objet privilégié par la littérature que comme un agent susceptible de la transformer et de cette manière d’offrir une nouvelle perspective sur le médium photographique et ses spécificités. La photographie est tour à tour envisagée comme modèle de fonctionnement mécanique et objectif, comme archive, comme le révélateur d’une réalité autrement imperceptible ou encore comme l’impulsion permettant de commencer à écrire. Sa posture par rapport à la littérature peut donc être celle d’un modèle, d’un reflet, d’une métaphore ou d’une opposition. Si le propos articule le plus souvent le travail d’un écrivain avec le médium photographique, il arrive aussi que la rencontre soit celle d’un écrivain et d’un photographe. C’est dans la révélation des multiples facettes de cette circulation entre photographie et littérature, entre photographes et écrivains que l’évocation du prisme semble le mieux se justifier.
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* A propos du numéro 43 de la revue Textyles - Revue des lettres belges de langue frnaçaise : « La Littérature au prisme de la photographie », dirigé par Nathalie Gillain et Pierre Piret, Bruxelles, Le Cri éditions, 2013. ISBN : 978-2-8710-6679-8.